La physique des catastrophes / Marisha Pessl | Une Russe à Paris
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mercredi 17 octobre 2007

La physique des catastrophes / Marisha Pessl

J'ai enfin terminé les 624 pages de La physique des catastrophes de Marisha Pessl. Ceux qui suivent l'actualité littéraire ont dû déjà en entendre parler: un premier roman déjà bestseller aux Etats-Unis, écrit par une toute jeune femme (27 ans) toute jolie, y a de quoi plaire à l'industrie (oui oui, car c'est bien l'industrie médiatique qui s'en mêle, comment peuvent-ils passer une écrivain si mignonne qu'ils peuvent enfin publier des interviews avec une photo).

J'avoue, je ne sais pas exactement ce qui m'a attiré vers ce roman (certainement une critique de Télérama, diront certains). Probablement, je me sentais trop grande pour des Harry Potter et des Club de Cinq, mais je gardais une certaine nostalgie pour les livres sur le monde adolescent avec un peu de suspense, comme je les aimais il y a une dizaine d'années... Ca me fait vieille ça, aïe! Peut-être vaut-il mieux admettre que je lisais encore des Harry Potter à 20 ans! :-D

L'histoire: sans entrer dans trop de détails, La Physique des Catastrophes décrit la Terminale d'une lycéenne américaine pas comme les autres (car possédant une culture encyclopédique et un sens d'auto-dérision), une année remplie d'événements et de bouleversements, centrée autour de trois personnages: Bleue van Meer (la lycéenne en question), son père, Gareth van Meer (un brillant professeur, à la fois séducteur et papa-poule) et Hannah Schneider, une mystérieuse prof de cinéma du lycée qui entretient des liens étrangement proches avec certains élèves. De la saga familiale au roman adolescent, du suspense au roman d'amour (des amours pas tout à fait réciproques), de la description de la jeunesse américaine - qui m'a beaucoup rappelé Moins que zéro de Bret Easton Ellis - à la description de la génération de leurs parents (d'un père, brillant intellectuel, à des parents ordinaires qui collectionnent des bons de réduction et tondent leur pelouse)... Vous aurez compris, on peut mettre beaucoup de choses dans 624 pages.

Plus que l'histoire, c'est le sens d'observation de Marisha Pessl, et sa capacité de créer un personnage en quelques phrases, ... Quelques détails bien saisis, et il se présente devant vous plus vrai que nature. Elle est probablement l'écrivain qui a décrit le plus de sourires différents au sein d'un même livre (un sourire qui apparaît comme Lauren Bacall dans l'embrasure d'une porte; comme le feu d'un briquet cassé qui disparaît tout de suite; un héros qui distribue ses sourires tel un homme-sandwich qui distribue ses flyers...) - chacun est unique, et chacun nous rappelle quelqu'un.

C'est vrai, il y a beaucoup de citations et de (vraies et fausses) références bibliographiques dans le texte. Ça irrite certains. Je le vois plutôt comme faisant partie du personnage de Bleue van Meer, un reflet de sa jeunesse qui a besoin de trouver appui chez des auteurs pour exprimer ce qu'elle pense.

Et puis aussi, elle se pose des questions qu'il m'arrive/ait de me poser, moi aussi (et que, peut-être, se posent tous les enfants de parents intello, élevés dans un milieu culturel, et qui en ont gardé un léger mépris pour la culture populaire et les gens qui la prennent au sérieux):
En partant au bal avec Zach, un garçon fou amoureux d'elle, mais simplet, Bleue jette un dernier coup d'oeil en direction de la maison, où, dans le jardin les parents de Zach se tiennent toujours enlacés en les regardant s'éloigner. "Et sans jamais pouvoir l'avouer à papa, je me demandai, l'espace d'un instant, (...), en quoi c'était horrible d'avoir une famille comme ça, un père pétillant, un fils aux yeux si bleus qu'on s'attendait presque à voir des moineaux les traverser, et une mère qui regardait le dernier endroit où elle avait vu son enfant comme un chien à l'entrée d'un supermarché ne quitte pas des yeux les doubles portes automatiques".


Lire ou ne pas lire? Sincèrement, soit vous allez aimer, soit vous trouverez ça un peu lourd. Le conseil: feuilletez-le (de préférence au milieu, le début est un peu laborieux) dans une librairie vous vous ferez très vite une idée (je conseille pour ça le chapitre "Femmes amoureuses"). Et aussi: 600 pages, ce n'est pas beaucoup. Une semaine d'allers et retours en métro, et c'est bon. Profitez de la grève... :-)

La physique des catastrophes
Marisha Pessl
Gallimard
Traduit de l'américain par Laetitia Devaux.
624 pages.