(A Paris) Des touristes russes ou un coup de fouet à l'économie française | Une Russe à Paris
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samedi 14 juin 2008

(A Paris) Des touristes russes ou un coup de fouet à l'économie française



J'explose littéralement de fierté nationale. On a encore gagné! Non, pas l'Euro 2008 (c'est toujours pas fini), pas l'Eurovision, pas la coupe UEFA... Mais on a gagné quelques places au classement des touristes qui dépensent le plus à Paris! Selon ce classement, établi par Global Refund, l'entreprise chargée de rembourser la TVA sur les achats de plus de 175 euros par jour et par magasin, les touristes russes se sont hissés à la deuxième place des dépenses avec un "panier moyen" (je rêve de voir un de ces touristes nouveaux-riches déambulant chez Louis Vuitton avec un panier en osier) de 1231€, juste derrière les touristes d'Arabie Saoudite (1500€). Vous remarquerez comment on retrouve la cartographie des puis de pétrole, c'est génial. Les Russes devancent donc Hong Kong, Taiwan, la Chine, les US, le Japon, le Brésil, la Corée et le Maroc. Je précise pour ceux qui n'auraient pas bien lu ce paragraphe, que ce montant n'inclut pas les dépenses d'hôtel, de nourriture, de transports, ainsi que les dépenses de moins de 175€ (donc, pas ceux qui achètent chez H&M).


Ce qui est intéressant, c'est de rapprocher ces chiffres qui font chaud au coeur avec ce que l'Office de Tourisme parisien appelle, de façon très sexy, "arrivées hôtelières étrangères" (en gros, le nombre de touristes dans les hôtels parisiens par pays). Parce que ce palmarès-là n'a mais rien à voir avec le précédent! On y trouve, dans l'ordre, le UK, les US, l'Italie, l'Espagne et le Japon, l'Allemagne, la Belgique, la Suisse, les Pays-Bas et "Proche et Moyen Orient" (visiblement, lui aussi un pays pour l'Office du Tourisme). En activant un peu nos méninges, on comprend vite que des 10 pays aux touristes les plus enclins à jeter l'argent par les fenêtres seuls deux (les US et le Japon) figurent parmi les pays d'où provient la majorité des touristes! La conclusion limpidissime s'impose: les Russes sont non seulement riches, ils sont atrocement riches. En plus, il faut séparer le "panier moyen" en deux groupes - d'un côté, celui des touristes à l'ancienne, mus par le slogan "Voir Paris et mourir" (la vieille intelligentsia ainsi que les provinciaux qui font le voyage jusqu'à Paris en bus), et, de l'autre, le petit groupe de la jet-set russe très branchée ASmallWorld ("J'avais trop froid à Milan, je me suis acheté un vison").

Bref, tout ça pour vous dire que bientôt on va peut-être enfin arrêter de tomber sur des vendeuses japonaises chez Pierre Hermé & Co (oui, celles qui organisent une queue de 30 minutes pour acheter deux pauvres macarons) pour se retrouver... face à des vendeuses russes (les agences de rencontres franco-russes risquent de voir leur chiffre d'affaires chuter). Je ne suis pas sûre que l'on gagne au change, mais je trouve la tendance amusante à suivre. Au final, pour vous et moi, ce ne sera peut-être pas si grave. En revanche, pensez à ces pauvres russes qui ont leur HQ à Paris et leurs femmes qui apprennent le français: comme me disait l'une d'entre elles, "C'est horrible, je n'utilise jamais mon français, dans toutes les boutiques où je vais on me parle en russe, comment voulez-vous que je l'améliore!" Pauvre chou.

6 commentaires:

Cristophe a dit…

Ce qui serait intéressant de comparer c'est la dépense des touristes russes à Paris et le seuil de pauvreté en Russie.

tiusha a dit…

mes préférés: ceux qu'on peut croiser autour de Courchevel en chasse-neige avec des skis incrustés de diamants, sur la piste verte (véridique, bon les diamants c'étaient peut-être des faux, j'ai pas vu d'assez près!)

Une Russe à Paris a dit…

Christophe: tu as raison d'en parler. Alors, selon les dernières données, plus de 22 millions de Russes vivaient en dessous du seuil de pauvreté moyen pour la Russie (3.809 roubles (107,59 euros)). Maintenant, ce seuil de pauvreté est calculé par Rosstat qui, je pense, a gardé les standards soviétiques de l'après-guerre. Cela inclue donc pratiquement que la nourriture, mais pas le loyer (environ 300-700€/mois si vous louez), les produits culturels (mêmes prix qu'en France), les voyages (mêmes prix qu'en France), Internet (plus cher qu'en France)... Si vous avez des chiffres recueillis par une organisation internationale plus objective, je suis preneuse!

Tiusha pas mal les skis en strass! Dommage que je ne sache pas skier, j'aimerais bien aller les observer à Courchevelles d'un point de vue purement sociologique!

auldalliance a dit…

Rosstat n'est peut-être pas complètement à côté de ses pompes. Après tout, à la suite de l'effondrement de l'URSS, les foyers, pour la plupart, sont devenus propriétaires (ou quasiment exonéré de loyer) du logement qu'ils habitaient --> donc pas de loyer (remarque sans valeur pour les jeunes ménages). Pour les produits culturels, tu parles de la Russie, le pays du piratage :) Gorbushka (ou son équivalent à Piter) ne s'est pas encore aligné sur les tarifs de la Fnuc, si ?? --> donc payer le prix fort est un choix. Concernant les voyages, je m'en remets à toi (mais avec l'argent économisé sur le loyer... si on n'est pas un jeune couple... ouais, ok, ils sont à revoir ces critères, mais c'était une tentative d'explication - utile pour tes lecteurs français, car ils devaient halluciner, je pense)

Pour le ski, ça s'apprend facilement, je suis sûr que tu trouverais un charmant jeune homme ravi de te l'enseigner.

Une Russe à Paris a dit…

Auldalliance: En effet, je suis d'accord avec toi, le piratage rend la vie moins chère. Mais je maintiens que les "sorties" sont aussi chères qu'en France! On ne peut pas dire aux gens qu'ils seraient riches s'ils ne tenaient pas autant à aller au théâtre...

Pour les appartements, soit (même s'il y a encore beaucoup de gens qui n'ont qu'une chambre dans un appartement communautaire) - en sachant que les "charges" s'élèvent souvent à 100€/mois et plus (en sachant qu'un prof gagne à peu près 200€, c'est énorme). Il y a un gap énorme entre ceux qui gagnent "en roubles" (en gros, toutes les professions en rapport avec la culture et la science - les salaires vont rarement au-delà de 500€), et ceux qui gagnent "en dollars" (une secrétaire à Moscou peut facilement gagner 1000€).

C'est pour ça que les statistiques en Russie ne reflètent jamais la réalité: cela me rappelle une vieille blague russe. "La température moyenne de l'hôpital est 37,2C" (cette température est une moyenne entre celle des cadavres et celles des fiévreux).

auldalliance a dit…

marrante la blague :)
Je vois que tu lui as donnée la couleur locale (ou devrais-je dire "acclimatée") - en Russie, la température corporelle n'est plutôt de 36,8°C..? ;)