(Gourmandises) Des wagashi chez Toraya, ou le Japon à Paris | Une Russe à Paris
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vendredi 12 décembre 2008

(Gourmandises) Des wagashi chez Toraya, ou le Japon à Paris

Le quartier entre Madeleine, Concorde et place Vendôme concentre la quintessence de l'art du salon de thé de la Rive droite avec, notamment Angelina (et son chocolat chaud indétrônable), 1 T rue Scribe (dont je vous parle bientôt), Ladurée (et son Saint-Honoré à la rose)... et plein d'autres. Décor soigné mais ambiance un peu surfaite, desserts proches de la perfection gastronomique, service un peu guindé ou suranné mais tellement chaaarmant... tout cela, on le retrouve chez Toraya, mais... de façon détournée. Car Toraya est un salon de thé japonais, et rien n'est pareil de l'autre côté du globe, c'est bien connu depuis qu'aAlice au pays des merveilles s'est posé la question sur les antipodes et les antipathes. Toraya est ainsi un bien curieux mélange de l'ambiance "8ème arrondissement" et de la tradition japonaise de desserts, wagashi, et de la cérémonie du thé, bien évidemment. Au final, une expérience dépaysante aux confins de la luxure... et du minimalisme.

Le wagashi (wa (japonais) et kashi (fruit) est une pâtisserie japonaise traditionnelle. Ce sont des desserts bien particuliers: aux quelques ingrédients de base (sucre de canne, haricots, agar-agar, farine de riz et farine de blé) s'ajoutent des ingrédients "éphémères", en fonction des saisons: des marrons en hiver, des fleurs de cerisiers en printemps, et ainsi de suite. Plus qu'un dessert, le wagashi est un concentré gastronomique de la réflexion sur la nature, la littarature ou la peinture... autant vous dire qu'il faut le savourer lentement pour avoir le temps de réfléchir à tout ça.

Bien évidemment, les clients parisiens de Toraya ne s'adonnent pas toujours à ce genre de réflexion. Un samedi après-midi, c'est surtout l'endroit où échouent des shoppeurs fatigués (face à moi, un homme au visage si las que je lui trouve quelque chose de canin, oui, son visage me rappelle un bloodhound) , où ont lieu des first dates soigneusement planifiés, où viennent prendre une tasse de thé des couples qui n'ont rien à se dire et qui mangent en silence... Bref, tous ces gens que vous espérez ne jamais devenir ou êtes ravis de ne plus être. A ma gauche, justement, un jeune homme se lance dans un monologue laborieux visant à séduire sa compagne. C'est clairement leur premier rendez-vous... "Je lis, oui. Je lis. Mais c'est dur. J'avais commencé à lire Lacrimosa. Mais j'ai arrêté. Au boût de 48 pages! J'étais essouflé." - venant d'un type qui a l'air de passer bien plus de temps dans une salle de gym que dans une bibliothèque, c'est doublement étonnant. La conversation glisse sur la nourriture, terrain où il se sent plus à l'aise, face à sa compagne qui ne sait pas ce que c'est qu'un KFC (je vous jure): "C'est comme la Brioche Dorée", lui explique-t-il, l'air nonchalant. Puis continue: "Je ne mange pas que chez mes parents, je me fais aussi à manger! Alors j'ai mangé copieusement et j'ai pris deux vodkas..." En fait, comme beaucoup de salons de thé, Toraya est un excellent terrain de chasse pour les amateurs de la Comédie Humaine. Et oui, je l'avoue, je me suis emparée d'un stylo pour noter, noter, noter ces dialogues aussi succulents que les wagashi...

Justement, qu'en est-il des wagashi? J'aime beaucoup le gâteau matcha à l'azuki aux marrons glacés (photo); la texture un peu farineuse du thé marcha et des marrons glacés est parfaite! Je suis aussi une grande fan de leur glace (ou sorbet?) au thé vert et, encore plus, de la glace (là je suis sûre) au sésame blanc, absolument délicieuse. Et puis, bien sûr, bien sûr, les macarons, très délicatement parfumés et beaucoup moins sucrés que les macarons de Ladurée, par exemple... Le tout accompagné d'un thé (je prends souvent un genmaicha au riz grillé), joliment présenté, exhalant de douces odeurs... (je suis en train d'écouter du jazz en rédigeant ce billet, alors ça me rend romantique. Non parce que sinon, Toraya, faut pas rêver non plus, ce n'est pas l'endroit magique qui vous fera tout à coup découvrir la philosophie ou la beauté d'une fleur de cerisier emprisonnée dans de la gelée, il faut y mettre de l'imagination!)

Mon imagination, je l'ai emprisonnée dans cette jolie (je me flatte) photo faite avec un Lomo (voir mon post d'hier sur les Lomo) - je parle de la photo tout en haut de ce billet. J'aime beaucoup cette atmosphère floutée-feutrée mais très graphique: la quintessence du Japon, la douceur et l'ordre.

Pour en savoir plus:
Le site de Toraya avec plein de photos et descriptions alléchantes de wagashi
Un reportage dans Madame Figaro sur la nouvelle mode des wagashi (je suis terriblement dans le vent).

En pratique:
Toraya
10, Rue St-Florentin,
75001 Paris

tlj sauf dimanches et fêtes