Le procès des Fleurs du Mal de Baudelaire sur scène: un spectacle intéressant à voir demain et après-demain dans l'un des théâtres de la Cartoucherie de Vincennes, l'Aquarium.
Qu'est-ce que le procès Baudelaire? Si vous vous souvenez, après la publication des Fleurs du Mal en 1857, un procès fut intenté contre Baudelaire, accusé de d'outrage à la morale publique et aux bonnes moeurs. Le poète sera condamné à une amende de 300F (ainsi que ses éditeurs), et devra retirer six poèmes:
Les Bijoux, Le Léthé, À celle qui est trop gaie, Lesbos, Femmes damnées et Les Métamorphoses du vampire.
(l'histoire du procès est très bien racontée ici.)
Le spectacle est créé par Olivier Treiner avec l'Association amicale des Secrétaires et Anciens Secrétaires de la Conférence du Barreau de Paris. Comment, vous ne connaissez pas?! Rien de plus normal. Derrière cette formulation plus qu'obscure se cache une institution très ancienne mais peu connue du commun des mortels. Les secrétaires de la Conférence sont un groupe de 12 avocats brillantissimes qui sont élus chaque année, à l'issue d'un concours d'éloquence dont je vous parlerai très bientôt, pour représenter le Barreau de Paris, s'occuper de la défense pénale (ce sont eux, par exemple, qui défendent les pirates du Ponant), organiser la célèbre conférence Berryer (un vrai tournoi d'humour), et remplir plein d'autres missions toutes aussi ardues qu'excitantes. Bref, vous aurez compris, les mots-clés ici sont "éloquence" et "avocat". Car, qui mieux qu'un avocat éloquent peut faire revivre le procès de Baudelaire? Les connaissant, je suis certaine que nous assisterons là, sinon à un grand morceau de théâtre, à un très grand procès. A découvrir absolument!
En pratique:
16 et 17 mai 2008 à 20h30.
Théatre de l'Aquarium, Cartoucherie de Vincennes
réservation : 01 40 53 10 10 ou [email protected]
prix: 25 euros
Navette gratuite avant et après le spectacle à partir du Métro Chateau de Vincennes.
Et, pour les curieux, voici le célèbre arrêt rendu par le Tribunal correctionnel de la Seine en 1857:
- « En ce qui touche le délit d’offence à la morale religieuse :
- « Attendu que la prévention n’est pas établie, renvoie les prévenus des fins de poursuites ;
- « En ce qui touche la prévention d’offence à la moral publique et aux bonnes mœurs :
- « Attendu que l’erreur du poète, dans le but qu’il voulait atteindre et dans la route qu’il a suivie, quelque effort de style qu’il ait pu faire, quel que soit le blâme qui précède ou qui suit ses peintures, ne saurait détruire l’effet funeste des tableaux qu’il présente au lecteur, et qui, dans les pièces incriminées, conduisent nécessairement à l’excitation des sens par un réalisme grossier et offensant pour la pudeur ;
- « Attendu que Baudelaire, Poulet-Malassis et De Broise ont commis le délit d’outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, savoir : Baudelaire, en publiant ; Poulet-malassis en publiant, vendant et mettant à la vente, à Paris et à Alençon, l’ouvrage intitulé : Les Fleurs du mal, lequel contient des passages ou expressions obscènes ou immorales ;
- « Que lesdits passages sont contenus dans les pièces portant les numéros 20, 30, 39, 80, 81, 87 du recueil ;
- « Vu l’article 8 de la loi du 17 mai 1819, l’article 26 de la loi du 26 mai 1819 ;
- « Vu également l’article 463 du Code pénal ;
- « Condamne Baudelaire à 300 francs d’amende,
- « Poulet-Malassis et De Broise chacun à 100 francs d’amende ;
- « Ordonne la suppression des pièces portant les numéros 20, 30, 39, 80, 81 et 87 du recueil,
- « Condamne les prévenus solidairement aux frais. »