(Cine) Valse avec Bachir d'Ari Folman | Une Russe à Paris
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lundi 21 juillet 2008

(Cine) Valse avec Bachir d'Ari Folman

La première fois où j'ai entendu parler de Valse avec Bachir c'était en mai, lorsqu'on lui prédisait la prix de la mise en scène, voire la Palme d'Or à Cannes. Finalement, il n'a eu ni l'un, ni l'autre. Mais les critiques enthousiastes ont suffi pour lancer le film qui a dépassé déjà les 300 000 entrées en France. Ari Folman réussit en effet un exploit avec, à la base, un genre inclassable (un documentaire animé!) et un sujet difficile et méconnu du grand public (massacre des camps de refugiés Sabra et Chatila en 1982 par les milices chrétiennes).

On aurait pu craindre l'artifice de l'animation, mais il n'en est rien: entre bande dessinée et cinéma (notamment pour le travail sur la lumière), le langage employé par Folman apporte une distance nécessaire pour pouvoir aborder le sujet, mais cette distance se révèle trompeuse tant on adhère à l'histoire, un peu comme on le faisait, enfant, avec nos héros préférés de BD et de dessins animés. Dès la haletante scène d'ouverture, où vingt-six chiens enragés traversent une ville fantôme à la recherche de leur victime, on ne parvient plus à détacher les yeux de l'écran. On en sort étonnés d'avoir pris à coeur l'histoire de ce jeune en quête de sa mémoire.

On aurait pu craindre l'ennui d'un documentaire, mais il n'en est rien: ce que fut, un temps, un vrai documentaire (filmé par Ari Folman en vidéo, puis transformé en dessin animé), devient ici une enquête qui tient le spectateur en haleine. Ari, le personnage principal, se rend compte que des pans entiers de sa vie se sont effacés de sa mémoire, dont toute la période de la guerre du Liban. Il entreprend alors à interviewer des amis, des participants, des journalistes, des psychologues pour retrouver le chemin des événements et se souvenir, enfin, où il était lors du massacre de Sabra et Chatila.

On aurait pu craindre un sujet difficile et trop pointu pour le grand public qui n'en a cure des massacres qui se sont passés si loin, il y a si longtemps. Il n'en est
rien, car Valse avec Bachir est tout d'abord un film sur l'inutilité de la guerre, sur les rapports humains, sur la mémoire. Nul ne l'expliquera mieux qu'Ari Folman lui-même, dans sa note d'intention:
"J'ai réalisé Valse avec Bachir du point de vue d'un soldat quelconque, et la conclusion est que la guerre est si incroyablement inutile ! Ca n'a rien à voir avec les films américains. Rien de glamour ou de glorieux. Juste des hommes très jeunes, n'allant nulle part, tirant sur des inconnus, se faisant tirer dessus par des inconnus, qui rentrent chez eux et tentent d'oublier. Parfois ils y arrivent. La plupart du temps, ils n'y arrivent pas."

La bande-annonce vous donnera un aperçu de ce style très particulier car puissant avec très peu de moyens (notamment chromatiques):
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Faut-il aller voir ce film? Oui, même si le sujet ne vous dit rien, et même si vous n'aimez pas les dessins animés. Même si Valse avec Bachir n'était qu'un exercice de style, il vaudrait la peine d'être vu.