jeudi 29 mai 2008

(Livres) Première publication des Mémoires de Serge Diaghilev

La publication des mémoires de Serge Diaghilev fut pour moi une grande découverte littéraire (ou plutôt historique). Une première mondiale, tout de même.

Petit paragraphe pour ceux qui ne connaissent pas Serge Diaghilev ni les Ballets Russes. Serge Diaghilev est un personnage absolument extraordinaire, c'est le premier manager des temps modernes: n'étant pas artiste lui-même, il a réussi à attirer et à faire travailler ensemble les meilleurs artistes et créateurs de l'époque (on parle la du début du XXe siècle, plus précisément de 1909-1929): c'est lui qui découvra Nijinsky et Stravinsky, pour n'en citer qu'eux. C'est aussi lui qui a fait revenir la danse sur le devant de la scène, et qui en a fait un art novateur (que de scandales entouraient ses mises-en-scène!).

Le livre. On pensait jusqu'à aujourd'hui que Diaghilev n'avait pas laissé de mémoires. On retrouva récemment une quarantaine de petites fiches en carton où Diaghilev avait noté quelques souvenirs, vers la fin de sa vie - lorsqu'il s'était mis à collectionner des livres anciens et à la cataloguer de façon fanatique, sans même les lire, et où les fiches de cartons avaient peu à peu remplacé les amis absents. Ce ne sont donc pas vraiment des mémoires, mais plutôt des bribes de souvenirs.

Pour ceux qui ne font que découvrir Diaghilev et les Ballets Russes, je conseillerais plutôt de lire les mémoires de Serge Lifar ou de Boris Kochno, plus détaillés et instructifs. Pour ceux, en revanche, qui n'en sont plus à la découverte de cette période, les mémoires de Diaghilev apporteront un sentiment inestimable - celui de saisir, l'espace d'un instant, l'essence d'un homme génial et insaisissable. Vous n'avez pas encore fini de lire et l'impression de le connaître se dissipe déjà - mais le livre vaut bien le détour pour ces quelques instants volés à l'éternité.

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mardi 27 mai 2008

(Dessin animé) Le street art dans les rues de Buenos Aires

Un superbe dessin animé m'est tombé entre les mains, alors je partage! Il s'agit d'un artiste argentin Blu: il a réussit à réunir deux techniques ne s'étaient pas encore rencontrées sur les rues de Buenos Aires - le street art et le dessin animé! Pendant tout un hiver, il a dessiné et photographié chaque image, qu'il a ensuite transformé en Muto, un dessin animé sur le thèmes de métamorphoses urbaines. Sublime.

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En savoir plus: Muto - an ambiguous animation painted on public walls

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lundi 26 mai 2008

(Cri du coeur) Le trop-plein de palmarès

« Reducing adults to children, the new kitsch made masses easier to manipulate by reducing their cultural needs to the easy gratification offered by Disney cartoons, pulp literature, and romance novels » (Binkley)

Week-end chargé en palmarès
. En écoutant France Cultures ce matin (car, vous le savez, je ne fais confiance qu'à deux sources d'information - Télérama et France Cultures. Et non, ce n'est pas du tout réducteur!)... En écoutant donc la revue de presse internationale ce matin, j'ai senti qu'un clivage s'était formé: la presse mondiale avait concentré son attention sur deux événements majeurs - les résultats d'Eurovision et la Palme d'Or. La ligne de partage se situerait quelque part autour du Rhin, avec la presse est-européenne louant la victoire de la Russie à l'Eurovision, la presse "occidentale" saluant la Palme d'Or courageuse. Alors, qu'est-ce? Une bataille entre la culture populaire et les intellos, entre le kitsch et le bon goût, entre l'Est et l'Ouest?

Au-delà du jugement bon goût/mauvais goût (si on est sûr du mauvais goût de l'Eurovision, on n'est pas toujours certain de celui du festival de Cannes), il conviendrait de se demander ce qui est en jeu ici. Un sentiment nationaliste triomphant d'un côté, un film franco-français choisi par un jury on ne peut plus international de l'autre. Apparemment, malgré les années qui se sont écoulées depuis l'effondrement de l'URSS, une chanson peut encore souder les épaves de l'empire qui autrement se détestent (pour certaines)! C'est tout de même étrange que dans certains pays européens (disons, Europe de l'Est + la Grèce) l'Eurovision est suivi religieusement et constitue une affaire de fierté nationale! Ce matin, l'Echo de Moscou (la dernière radio d'opposition de Russie - bien qu'elle appartienne, elle aussi, à Gazprom) se demandait quelle influence la victoire de la Russie à l'Eurovision pourrait avoir sur la politique internationale et l'attitude des pays occidentaux envers la Russie. Faut le faire quand même... A Cannes, un film français n'avait pas reçu la Palme d'Or depuis 21 ans. Evénement. Fierté nationale. Comme quoi, même quand l'éducation nationale est en berne, on peut en faire un objet de fierté. Quels malins!

Je dois dire que la performance de Dima Bilan, le gagnant russe de l'Eurovision, est probablement une des vidéos les plus kitchissimes que j'aie vues ces derniers temps. Si vous avez un moment, regardez au-delà de la deuxième minute, parce que là, ça devient tout bonnement excellent: le chanteur est accompagné d'un patineur (Pluschenko, un des meilleurs il y a quelques années) et d'un violoniste, tout deux vêtus de blanc. Les trois se déchaînent sur un rond d'un diamètre de 3m. Un condensé du mauvais goût du show business russe. Si je vous dis que le violoniste, en plus, joue sur un Stradivarius... *sigh*

Mais où va la culture?! signé: mamie.

Believe de Dima Bilan, gagnant de l'Eurovision 2008:



Entre les murs (bande-annonce):



Il y a 2 ans, je n'étais pas arrivée à finir le livre de François Bégaudeau (il avait eu le prix France Cultures, et, fidèle au couple Télérama-FC, je m'étais mise à le lire), tellement j'étais folle de rage en le lisant. Je n'aurais jamais pensé que les choses allaient si mal à l'école. Mais au final, après mure réflexion, je préfère bouillonner de rage devant l'autodérision à la française, plutôt que devant cette farce musicale d'un "chanteur en moins" sans le moindre recul. Adorno disait "Dans le Kitsch est peut-être même le vrai progrès de l'art." Mais il dit bien "peut-être".

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dimanche 25 mai 2008

(Ciné) Un Conte de Noël d'Arnaud Desplechin

Premier film "cannois" à sortir sur les écrans, Un Conte de Noël semble aller à contre-courant: une sortie juste avant les vacances d'été, alors que tous les films présentés à Cannes sortiront en automne, et en plus, un thème de Noël resservi en plein mois de mai, cela intrigue... Les critiques sont enthousiastes. Et nous?

Et bien nous, les spectateurs simples d'esprit, nous sommes - comment dit-on, déjà? - partagés. C'est ça, partagés. Tout à coup, nous nous sentons inférieurs aux messieurs les critiques qui n'y ont vu que du feu, dans ce Desplechin, alors que nous, pendant 2h30, on avait l'impression de passer à côté de quelque chose... De quoi, justement? Rassurez-vous, Un Conte de Noël est loin d'être un mauvais film. On ne pourrait même pas le qualifier de "chiant" (qualificatif dont on affuble pourtant 95% des films d'auteur). Et bien, qu'est-ce qui cloche alors? Non non, ne mettons pas la charrue avant les bœufs, et commençons par le début.

L'histoire. Un film choral (très en vogue ces derniers temps), une sorte de "Bûche" revue et corrigée, avec au moins cinq histoires qui s'entremêlent et s'entrechoquent un soir de Noël.Abel et Junon ont eu deux enfants, Joseph et Élisabeth. Le premier tombe malade et a besoin d'une greffe de moelle osseuse. Abel et Junon font un troisième enfant dans l'espoir qu'il soit compatible; manque de bol, avant qu'il ne soit né, ils savent qu'il ne l'est pas, Henri nait et vit avec ce sentiment d'inutilité, aux côtés d'une mère indifférente et d'une sœur haineuse. Trente ans plus tar, c'est Junon qui a besoin d'une greffe. A cette occasion, toute la famille se retrouve dans la maison familiale à Roubaix pour passer Noël ensemble, même Henri, pourtant banni par sa sœur depuis six ans.

Que vous dire? La réalisation est superbe, elle ne manque ni de punch ni de rythme; les acteurs sont parfaits, chacun étant crédible dans son rôle (Mathieu Amalric est génial, tout de même). Desplechin transmet une atmosphère de Noël, d'hiver, d'attente qui me fait penser à Casse-Noisette (je suis très vieux jeu, n'empêche que, si on réfléchit, l'histoire de la haine entre une sœur et un frère dont les parents ne veulent rien savoir, un soir de Noël, c'est tout à fait ça). La musique de Grégoire Hertzel est superbe (c'était d'ailleurs lui, le compositeur des Méduses, ce n'est pas étonnant que cela m'ait plu).

Alors quoi? Qu'est-ce qui manque? Eh bien... c'est juste tr-o-o-o-p long, c'est insoutenable au bout d'un moment. On rêve d'un producteur américain qui imposerait à Desplechin le final cut à 100 minutes, pas 150. Et sinon, si on accepte de rester là pendant 2h30 (ce qui m'est arrivé maintes fois au cinéma, sans le moindre ennui), "on demande des modifications"! Des histoires dont on ne comprend pas toujours les tenants et dont on ne comprendra pas la fin, une heure, ça va, deux heures, ça va, deux heures et demie, bonjour les dégâts! Je m'explique: si on ne comprend pas pourquoi une sœur hait tant son frère pendant toute sa vie, qu'on nous en parle pendant 2h30, et qu'à la fin on a l'impression qu'elle ne le déteste plus bien qu'on ne comprenne pas vraiment pourquoi. A moins qu'on n'ait pas bien compris et qu'elle le déteste toujours, auquel cas on n'a rien compris et surtout pas pourquoi en faire un film. Multipliez ce genre de pensées par le nombre d'histoires dans le film, et vous obtiendrez le même bourdonnement dans la tête que moi à la sortie du Conte de Noël.




Faut-il aller le voir? Je dirai plutôt oui. Alors, ce n'est clairement pas un film de vendredi soir, ne répétez pas mon erreur. N'essayez pas non plus un nouveau médicament antiallergique juste avant, ça ne finira pas bien. En revanche, je le sens bien un dimanche matin ou un samedi après-midi de pluie. Je vous le répète, j'ai trouvé que c'était un beau film magnifiquement interprété, il faut peut-être être plus en forme pour pouvoir le remplir de sens. Oh, Dieu, je n'ai pas été à la hauteur. Ou bien est-ce le cinéma français?

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vendredi 23 mai 2008

(Expo) Jean Fabre au Musée du Louvre

Il y a quelques jours, j'avais profité de ma grande matinée à l'exposition Babylone au musée du Louvre pour voir les installations de Jan Fabre. Vous voyez de quoi je parle, cette affiche toute mignonne avec un petit agneau (ou biche ou un autre cétartiodactyle, corrigez-moi si vous ne savez plus) que l'on voit partout dans le métro en ce moment? Et bien, détrompez-vous: l'exposition "L'ange de la métamorphose" de Jan Fabre est tout sauf mignonne. Au contraire, les objets exposés furent pour moi probablement les plus répugnants que j'aie jamais vus dans un musée. Explications en images.

Attirés par le petit chevreau doré, les visiteurs rentrent dans l'exposition. Ils y sont accueillis par une installation somme toute inoffensive, une sorte d'armure désarticulée dont les différentes parties ont été suspendues en l'air. Ils font un pas de plus. Et là...


Vous rentrez dans un univers bien différent (qui ne surprendra pas ceux qui connaissaient déjà l'oeuvre de Jan Fabre; pour ma part, ce fut une découverte). Déjà, son "animal" fétiche c'est le scarabée. Pas le scarabée égyptien, hein! Le bousier. Jan Fabre est fasciné par le pourri, le macabre, le serpentant - bref, par tout ce envers quoi nous éprouvons, de par notre éducation occidentale judéo-chrétienne, une répulsion profonde et inexplicable. Sur la photo de droite, un vers rampant à travers les tombes de peintres (grandeur nature, ça doit bien faire 10m x 5m avec du vrai marbre et un gros faux ver en silicone). Comme si cela ne suffisait pas, le ver siffle (en néerlandais) quelque chose comme "je veux sortir de l'étau de l'histoire". Conceptuellement, je trouve ça intéressant, il n'en est pas moins que je commence déjà à avoir des doutes sur les conséquences de la suite de l'exposition sur mes plans déjeuner.

Même le communiqué de presse du Louvre se montre avare de photos: les photos publiées sont prises d'un point de vue qui cache preque toujours la totalité de l'oeuvre. Comme sur la photo ci-dessous, où l'on voit un joli paon, et on se dit: mais qu'est-ce qu'elle raconte, Une Russe à Paris, ça a l'air plutôt joli! Ce que vous ne voyez pas, c'est qu'il s'agit d'un cercueil en écailles de bousier, avec une tête de Paon, quatre petites pattes de paon et une queue...

Suivent donc des cerveaux, des têtes de mort serrant dans leurs dents des rats morts (ou autres rongeurs, j'avoue que je n'ai pas osé lever les yeux une deuxième fois), divers objets en bousier (pardon, scarabée), têtes d'hibous avec des yeux-prothèses humains... Après avoir vu l'exposition, le ver sur les tombes me semble presque sympathique, c'est un peu comme si vous tombiez, dans une exposition de Bacon, sur une oeuvre de Fragonard. La seule oeuvre que j'ai bien aimée, ce sont les pigeons et les rats (dont vous pouvez avoir un aperçu ici) envahissant une des balustrades du Louvre. Ce qui est bien, c'est que déjà, j'ai pu fixer l'oeuvre plus de 5 secondes. Même au-delà de 15 secondes de scrutation intense, je n'étais toujours pas parvenue à trouver les rats. Et tous seuls, les pigeons en verre de Murano colorés par l'encre de Bic, même déféquant sur la balustrade, sont presque délicieux. Au final, les crottes de pigeon font partie du quotidien de tout parisien, c'est peut-être pour ça que j'étais moins choquée. Plus sérieusement, passez-y juste pour voir cette balustrade souillée par le verre de Murano, pour moi c'est la seule oeuvre qui vaille le coup d'être vue par les âmes (trop) sensibles.

Faut-il aller la voir? Dans la mesure où l'expo n'est pas payante et que, de toute façon, il faut absolument que vous alliez au Louvre voir l'expo Babylone, passez-y! Histoire de mesurer votre réaction. Si certaines oeuvres ne vous paraissent pas dégueulasses, lisez le carton d'accompagnement avec le titre et les matériaux dont c'est fait. En revanche, si, comme moi, ce que vous vouliez, c'est voir les maîtres flamands (en fait, j'avais complètement oublié cette histoire de Jan Fabre et avais entraîné une amie néophyte à la découverte des grands peintres flamands), passez votre chemin, car vous ne pourrez même pas lever les yeux sur les oeuvres accrochées aux murs, de peur de croiser le regard d'un hibou-garou vous fixant d'une prothèse oculaire moqueuese.

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mardi 20 mai 2008

(Musique) Anywhere I lay my head de Scarlett Johansson

Aujourd'hui sort le premier album de Scarlett Johansson, "Anywhere I lay my head". Si vous ne le saviez pas, c'est que vous êtes très chanceux car vous avez pu échapper au matraquage médiatique de la presse (féminine, pour l'essentiel), bravo! Maintenant, vous pouvez enfin accéder à mon résumé super-objectif pas matraquant pour un sou. Car - oh sacrilège! - je n'ai pas aimé ce "Anywhere I lay my head". Explications.

A quoi s'attendait-on? Connaissant les rôles de Scarlett Johansson (des films de Sofia Coppola à ceux de Woody Allen), on pensait, à tort, qu'elle partagerait non seulement les goûts cinématographiques de ces réalisateurs, mais aussi leurs goûts musicaux. On voulait donc du lounge à la Lost in translation, on voulait du jazzy à la Woody Allen, on voulait du translucide à la Peter Webber, le tout agrémenté d'un sens de l'humour propre à l'actrice (elle ferait rire Woody Allen) et de sa sensualité qui lui nous sort déjà par les oreilles tant on en parle. Ne me comprenez pas mal, j'adore Scarlett Johansson, je trouve que cette fille a une présence incroyable et qu'en plus elle n'a pas l'air conne, chose rare par les temps qui courent. Mais voilà qu'elle brise tous les espoirs que j'avais placé sur ses frêles épaules (oui, on peut avoir des gros seins et des épaules frêles)!

Qu'a-t-on obtenu? Pour ce premier album, Scarlett Johansson a choisi de reprendre des chansons de Tom Waits. Déjà, pas ma tasse de thé. Bon, après, réflexion, je reprends ce que j'ai dit plus haut sur mon avis super-objectif, il est biaisé comme tous les avis du monde - mais il est trop tard! vous êtes déjà en train de lire cet article... Revenons à nos moutons, donc. Là où Tom Waits n'est que rugissements, passions et sifflements, Scarlett Johansson n'est que murmure, monotonie et effacement. Des compositions, certes, très lounge mais sans cet effet "planant" que l'on en attend d'habitude. Des arrangements, certes, intéressants mais qui partent trop en "recherche musicale" pour qu'on puisse les apprécier pour l'émotion qu'ils suscitent, d'ailleurs, ils n'en suscitent aucune. Aucune, sauf qu'en fait, ces chansons, ça fout le cafard. Vraiment. Ne les écoutez surtout pas sur le chemin du bureau, ça peut tuer une matinée entière!

Et puis, et puis, le plus important dans cet album scarletto-propulsé: la voix. Qu'en est-il de la voix de Scarlett, un brin fêlée, si sensuelle dans ses films ? A ma grande surprise, dans cet album sa voix oscille entre une voix d'homme (mais si, je vous jure) très dure et poitrinée (est-ce vraiment la peine de faire descendre la moitié des chansons jusqu'au mi de la troisème octave (e3)?) Par moment, sa voix sonne différemment, avec un côté Marylin Monroe que l'on connaît, mais alors on distingue à peine les notes qu'elle chante. Avec tout ça, on n'entend pas tellement bien ni les notes ni les paroles, et ne ressent aucune émotion (cette voix totalement inexpressive, serait-ce voulu?)

Verdict: faites-vous une idée en écoutant l'albume ici (cliquez sur "Listen to all" en haut de la tracklist; ça marche mieux sous Internet Explorer), et puis passez votre chemin. Moi, j'attends que Scarlett nous fasse quelque chose d'aussi talentueux que ce Summertime enregistré pour un disque au profit d'un programme d'éducation du philarmonique de Los Angeles (vidéo ci-dessous). En fait, elle a une belle voix et du style, il lui manque juste de trouver le bon producteur...
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lundi 19 mai 2008

(Expo) Babylone au Musée du Louvre

Exposition fantastique que celle organisée par le Louvre, le British Museum et le Staatliche Muzeen de Berlin. Il vous reste deux semaines pour la voir, courez-y!

Que sait-on de Babylone? La tour de Babel, les jardins de Sémiramis (encore faut-il déjà savoir les situer à Babylone), l'écriture cunéiforme, le Talmud de Babylone, le code d'Hammurabi pour les juristes... guère plus! L'exposition au musée du Louvre nous plonge dans les cinq millénaires de l'histoire babylonienne, à travers l'archéologie, la littérature, la peinture, l'histoire, le théâtre et la musique. L'exposition s'articule en trois parties: l'archéologique (comptez au moins 1h30 au moins), la "légendaire" (Babylone dans l'imaginaire collectif; 1h) et la redécouverte par les fouilles (30min).

Au-delà de l'aspect artistique, c'est surtout par son éclairage civilisationnel que l'exposition révèle la société de Babylone. Vous découvrirez une civilisation éblouissante et incroyablement moderne. Tout d'abord, par son système légal sans égal - le fameux code de Hammurabi (1750 avt J-C), une des lois écrites les plus anciennes, et sans doute le plus célèbre et le plus complet des codes de lois de l’Antiquité, mais aussi des jugements (que faire si l'acheteur s'est accaparé d'un terrain plus grand que celui pour lequel il a payé), des contrats, des feuilles d'impôts de douane... Mais aussi une société portée sur les sciences - on y trouve des cartes (sur des tablettes d'argile, toujours), des textes d'astronomie, des horoscopes (comment sera le destin de votre enfant s'il naît quand Vénus vient d'apparaître); une religion élaborée et passionnante (comparez le récit du déluge babylonien avec celui de la Bible); une culture littéraire phénoménale (vous y trouverez chroniques, poèmes, mythes, hymnes) - le tout soigneusement traduit en français et présenté dans les fiches d'accompagnement. Ajoutez-y bijoux, statuettes, morceaux de colonnes, vases - bref, toutes ces épaves d'une civilisation échouée sur les rives de l'histoire - et vous obtiendrez une impression saisissante de ce que fut Babylone.

La deuxième partie de l'exposition est intéressante à plusieurs égards, à la fois par les oeuvres qu'elle contient et pour ce que ces oeuvres racontent de Babylone ou, plutôt, de ce que les hommes pensaient, savaient, rêvaient de Babylone à différentes époques. Des écrits de l'historien Flavius Joseph aux manuscrits de Saint-Augustin, des chroniques russes aux enluminures du Moyen Age, Babylone est omniprésente. Ainsi, les écrivains (par exemple, Voltaire), les historiens, les peintres (de Bruegel l'Ancien à Edgar Degas en passant par Delacroix), les musiciens (Rossini, Verdi...) - tous ce sont penchés sur les mythes babyloniens, qu'il s'agisse de Sémiramis, de Nabuchodonosor, de Sardanapale ou de la Tour de Babel. La troisième partie évoque les fouilles du début du siècle dernier faites par les Allemands, c'est intéressant bien que sans commune mesure avec les deux parties précédentes.

Faut-il aller la voir? Pour peu que vous vous intéressiez aux civilisations de l'Antiquité, cette exposition est pour vous. Remarquez, non, je dis n'importe quoi. J'y suis allée avec quelqu'un qui ne savait r-i-e-n sur Babylone et avait sillonné le Louvre à la recherche de la Joconde à la vitesse grand V en jetant des "ça ne m'intéresse pas" à 90% des collections du Louvre. Et bien, cette personne est ressortie enchantée de l'exposition Babylone et m'a remerciée mille fois de l'y avoir entraînée. C'est vous dire. Très pédagogique, l'exposition vous permet de passer du stade "connaissance zéro" au stade "j'adore, j'ai appris plein de trucs et veux en savoir plus". Seule condition: y consacrer un bon moment, ce n'est pas une de ces expositions grand public que l'on visite en 40 minutes!

Pratique:

Musée du Louvre, Hall Napoléon

Ouvert tous les jours de 9h à 18h, sauf le mardi
nocturnes jusqu'à 22h les mercredi et vendredi
Nocturne exceptionnelle jusqu'à 20 h le samedi
Nocturnes supplémentaires tous les jours à compter du jeudi 22 mai et jusqu'au dimanche 1er juin jusqu'à 22h SAUF les mardi et le jeudi 29 mai


L’exposition sera ensuite présentée à Berlin, Pergamon
Museum, du 26 juin au 5 octobre 2008, puis, dans un format
différent, à Londres, British Museum, du 13 novembre 2008 au
15 mars 2009.

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vendredi 16 mai 2008

(Photo): Les blogs, une nouvelle récolte

Comme tout le monde, il m'arrive de me perdre dans la blogosphère, de blogroll en blogroll. Mais alors, quand on en trouve un bon (blog), on y tient! Je partage avec vous mes dernières découvertes: deux blogs très récents et un très connu! Et vous, quelles découvertes avez-vous faites récemment?

And the winner is...

I'm Not There de Cécile Bishop. Contrairement à ce que le titre laisse penser, il s'agit d'un blog francophone. Cécile y publie des "photos sans titre, phrases sans contexte, avec ou sans rapport". Intriguant? Illustration.


Vous y trouverez également quelques portfolios de photos-commentaires, je vous conseille vivement celui-ci: "Si tu reviens, j'annule tout" (variations sur le thème). Vraiment, vraiment, cela fait longtemps que je n'ai pas vu un blog aussi jouissif, subversif, décalé et désintéressé. De la créativité pure et des jeux d'esprit, sans contraintes!

Numéro 2: Texto ou Tard. Questions d'actualité détournées, commentées et interprétées avec beaucoup d'humour, d'originalité et de détachement. Et parfois, de vraies questions.

Ici, une inteprétation toute personnelle des causes de l'incident Pascal Sevran (cliquez dessus pour lire):

Un petit que j'ai bien apprécié: "Avec une bonne éducation, on aura des slogans moins cons".

3. Et pour la fin, un blog bien connu (apparemment), The Sartorialist. Il s'agit d'un photographe (ex-directeur artistique dans la mode) qui passe son temps à arpenter les rues de New-York, de Paris, de Milan, sud de la France, d'Inde... (et du reste de la planète) pour shooter des gens de style (lire: habillés avec goût et originalité). Ca a l'air futile dit comme ça, mais l'intérêt de ce blog c'est justement de montrer non pas des modèles, mais de vraies personnes pas nécessairement habillées en grandes marques. Et en plus, ce sont, souvent de très très beaux portraits. Comme ceux-ci, par exemple (cliquez sur "Lire la suite").

© The Sartorialist

© The Sartorialist

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jeudi 15 mai 2008

(Théâtre) Outrage, le procès des Fleurs du Mal à la Cartoucherie

Le procès des Fleurs du Mal de Baudelaire sur scène: un spectacle intéressant à voir demain et après-demain dans l'un des théâtres de la Cartoucherie de Vincennes, l'Aquarium.

Qu'est-ce que le procès Baudelaire? Si vous vous souvenez, après la publication des Fleurs du Mal en 1857, un procès fut intenté contre Baudelaire, accusé de d'outrage à la morale publique et aux bonnes moeurs. Le poète sera condamné à une amende de 300F (ainsi que ses éditeurs), et devra retirer six poèmes:
Les Bijoux, Le Léthé, À celle qui est trop gaie, Lesbos, Femmes damnées et Les Métamorphoses du vampire.
(l'histoire du procès est très bien racontée ici.)

Le spectacle est créé par Olivier Treiner avec l'Association amicale des Secrétaires et Anciens Secrétaires de la Conférence du Barreau de Paris. Comment, vous ne connaissez pas?! Rien de plus normal. Derrière cette formulation plus qu'obscure se cache une institution très ancienne mais peu connue du commun des mortels. Les secrétaires de la Conférence sont un groupe de 12 avocats brillantissimes qui sont élus chaque année, à l'issue d'un concours d'éloquence dont je vous parlerai très bientôt, pour représenter le Barreau de Paris, s'occuper de la défense pénale (ce sont eux, par exemple, qui défendent les pirates du Ponant), organiser la célèbre conférence Berryer (un vrai tournoi d'humour), et remplir plein d'autres missions toutes aussi ardues qu'excitantes. Bref, vous aurez compris, les mots-clés ici sont "éloquence" et "avocat". Car, qui mieux qu'un avocat éloquent peut faire revivre le procès de Baudelaire? Les connaissant, je suis certaine que nous assisterons là, sinon à un grand morceau de théâtre, à un très grand procès. A découvrir absolument!

En pratique:

16 et 17 mai 2008 à 20h30.
Théatre de l'Aquarium, Cartoucherie de Vincennes
réservation : 01 40 53 10 10 ou [email protected]

prix: 25 euros
Navette gratuite avant et après le spectacle à partir du Métro Chateau de Vincennes.

Et, pour les curieux, voici le célèbre arrêt rendu par le Tribunal correctionnel de la Seine en 1857:

« En ce qui touche le délit d’offence à la morale religieuse :
« Attendu que la prévention n’est pas établie, renvoie les prévenus des fins de poursuites ;

« En ce qui touche la prévention d’offence à la moral publique et aux bonnes mœurs :
« Attendu que l’erreur du poète, dans le but qu’il voulait atteindre et dans la route qu’il a suivie, quelque effort de style qu’il ait pu faire, quel que soit le blâme qui précède ou qui suit ses peintures, ne saurait détruire l’effet funeste des tableaux qu’il présente au lecteur, et qui, dans les pièces incriminées, conduisent nécessairement à l’excitation des sens par un réalisme grossier et offensant pour la pudeur ;
« Attendu que Baudelaire, Poulet-Malassis et De Broise ont commis le délit d’outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, savoir : Baudelaire, en publiant ; Poulet-malassis en publiant, vendant et mettant à la vente, à Paris et à Alençon, l’ouvrage intitulé : Les Fleurs du mal, lequel contient des passages ou expressions obscènes ou immorales ;
« Que lesdits passages sont contenus dans les pièces portant les numéros 20, 30, 39, 80, 81, 87 du recueil ;

« Vu l’article 8 de la loi du 17 mai 1819, l’article 26 de la loi du 26 mai 1819 ;
« Vu également l’article 463 du Code pénal ;

« Condamne Baudelaire à 300 francs d’amende,
« Poulet-Malassis et De Broise chacun à 100 francs d’amende ;

« Ordonne la suppression des pièces portant les numéros 20, 30, 39, 80, 81 et 87 du recueil,

« Condamne les prévenus solidairement aux frais. »
Publié le 21 août 1857 par La Gazette des tribunaux et par L’Audience.

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mardi 13 mai 2008

(Ciné) My Father, My Lord de David Volach

My father, My lord est un premier film de David Volach très remarqué par la critique et le public des festivals (et pas mal boudé par les exploitants - il est à l'affiche de 4 salles parisiennes cette semaine). Un épisode biblique hors du temps rejoué dans la Jérusalem d'aujourd'hui, My Father, My Lord est un premier travail sensible mais encore imparfait.

L'histoire: David Volach revisite l'histoire du sacrifice d'Abraham autour de la question centrale: "faut-il continuer à servir un Dieu qui dévore ses enfants à l'instant même où on l'adore, ou se résoudre au vide des cieux ?"

Le réalisateur. Puisqu'il s'agit d'un premier film en partie autobiographique (ou, du moins, relevant d'un questionnement très personnel), disons quelques mots sur David Volach. Il grandit dans une famille ultra-orthodoxe de la communauté haredi de Jérusalem (une des plus religieuses du pays), avec 19 frères et soeurs. D'abord étudiant dans la prestigieuse Yeshiva de Ponevezh (école talmudique), il décide de quitter la communauté religieuse à 25 ans et commence des études de cinéma à Tel Aviv.
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Le film. Si l'histoire peut sembler lente et quasi non-existente (vous n'y serez peut-être pas sensible si vous n'avez pas vécu/ne vivez pas un questionnement d'ordre religieux), la réalisation, elle, est superbe. David Volach a une façon de filmer les visages qui fait penser aux tableaux des scènes bibliques ou des grands drames de l'histoire antique: comme dans Derniers jours de Pompéï de Brullov ou le Sacrifice d'Abraham de Rembrandt, notre regard est happé par les visages, si expressifs, si poignants dans leur douleur, dans leur incrédulité devant le malheur, envahis par la peur et la résignation.

My Father, My Lord reprend donc le rythme et le souffle des tragédies grecques (ou des récits bibliques, comme on préfère) pour raconter une histoire lancinante simple en apparence. Les couleurs et la douceur de la photographie ne sont pas sans rappeler les premiers films de Sokourov: on y perçoit parfois le même sépia velouté fragile.
La caméra de David Volach saisit le monde de l'enfance tel que le voit Menachem, petit garçon curieux et vif. Un nid de colombe, un chien qui tente de suivre son maître malade dans la voiture du Samu, un poisson qui ne survit pas dans l'eau salée de la Mer Morte... Tout l'intéresse, tout l'attire. Son père, en revanche, est plongé dans le monde de la religion et fait de la vie un commentaire talmudique plus qu'une découverte spontanée. Une friction entre les deux visions finira en tragédie antique.

Faut-il aller voir ce film? Oui, si vous vous intéressez au cinéma israëlien et voulez découvrir un nouveau réalisateur à suivre. Je suis certaine qu'il fera, un jour, un grand film. Pour l'instant, My Father, My Lord est pour moi une étude - lumineuse et pleine de promesses, mais encore inaboutie, tel un travail de fin d'études. Si ce film éveille votre curiosité mais vous n'avez pas le temps d'aller le voir, lisez au moins cette interview de David Volach pour en savoir un peu plus (voir ici).

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mardi 6 mai 2008

(Resto) Mes bonnes adresses parisiennes

Je vous livre ici une carte avec mes adresses gourmandes - restaurants, salons de thé, pâtisseries... bref, un condensé géographique de tentations!

J'ai déjà parlé de certains de ces endroits dans ce blog, d'autres non - en tout cas, en cliquant sur chaque signe, vous trouverez une petite description du lieu. J'ajouterai plus d'adresses progressivement!

Et si vous avez des suggestions à faire, n'hésitez pas! Vous aurez compris que j'ai du mal à me déplacer dans l'est parisien (pas parce que je n'aime pas, mais parce que c'est trop loin et qu'aucune de mes connaissances proches n'y habite, j'ai donc très peu d'occasions d'y aller). En revanche, je suis toujours preneuse quant aux adresses Rive Gauche! :-)






Vous pouvez aussi voir la carte en grand ici.

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lundi 5 mai 2008

(Resto) Le Soufflé de Claude Rigaud

Connaissez-vous Le Soufflé? Entre la place de la Concorde et la rue du Faubourg Saint-Honoré, pas loin de la rue Cambon, se cache une pure merveille. Très connu des guides (et donc très couru par les américains et les japonais), Le Soufflé reste un des restaurants parisiens les plus originaux, et aussi un de mes préférés! Au menu: des soufflés, pardi!

L'ambiance: décor un brin désuet mais très agréable car justement pas design et un peu hors du temps (le restaurant existe depuis 1961). J'adore les natures mortes aux murs - quelques oeufs, une bouteille de lait, des soufflés... On reste dans la thématique! L'accueil y est génial - rapide mais pas expéditif, chalereux mais pas envahissant, et les serveurs y sont de bonne humeur (chose rarissime à Paris dans ce genre de restaurant où, au mieux, la bonne humeur est remplacée par un professionnalisme sans faille). Bref, on est à l'aise. D'ailleurs, vous remarquerez qu'il y a beaucoup de gens qui mangent seuls, et ils restent souvent longtemps (sans qu'on essaye de les obliger à commander un café et de déguerpir vite fait), je trouve que c'est plutôt significatif de l'accueil.

La carte: vous l'aurez compris, on va au Soufflé pour ses soufflés. Ceci dit, la carte comporte également des plats tout à fait traditionnels (non soufflés), mais je ne les ai pas essayés. En entrée, un délicieux soufflé au fromage - un grand classique (comté/emmental). Ensuite, un soufflé aux asperges et un soufflé aux morilles (sur la photo; mais il y en a d'autres, aux fruits de mer, par exemple), délicieux, accompagnés d'une petite sauce (aux asperges/aux morilles respectivement). En fait, c'est la sauce qui fait le goût, la base du soufflé restant la même - aérienne mais fondante, un vrai régal. En dessert, le soufflé au chocolat noir avec sa sauce au chocolat blanc est un vrai must! Moi qui n'aime pas le chocolat, je me serais presque léché les doigts! Deux conseils: le soufflé, c'est quand même volumineux. Imaginez trois soufflés dans votre estomac, vous comprendrez. Donc, le bon plan c'est de prendre un menu soufflé (30€, entrée/plat/dessert) + un soufflé en plat, et partager l'entrée et le dessert. C'est la seule façon d'en sortir vivant! Et enfin: sachez que le soufflé et l'eau pétillante ne font pas bon ménage! ;-)

Au final, une adresse agréable, difficile à battre en termes de rapport prix/originalité à Paris. A essayer au moins une fois!

Le Soufflé (plus de photos sur le site)
01 42 60 27 19

36 rue Mont Thabor
75001 Métro Concorde
Tlj sauf dimanche et jours fériés

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vendredi 2 mai 2008

Ciné: Le Grand Alibi de Pascal Bonitzer

Qu'a-t-on envie de voir un 1er mai, en ce jour du travail? Et bien, comme pour beaucoup de boeufs travailleurs qui ont courbé leur dos depuis lundi dans des endroits tristes et sans âme, le 1er mai fut pour moi l'occasion de prendre enfin tranquillement mon petit-déj en feuilletant mon Elle Le Débat, Le Débat bien sûr ("Moyen-Orient : l'engrenage des méprises") et de reposer et de divertir mon cerveau par des tâches autrement plus excitantes que celles dont je le charge au bureau. Hier soir, j'avais donc sur ma balance de sorties ciné "le nouveau Fassbinder, super premier film allemand sur la violence conjugale où c'est la meuf qui tape son mari de flic, tu verras c'est renversant" (j'ai nommé L'Un contre l'autre de Jan Bonny) et le "dernier Agatha Christie avec Pierre Arditi et plein d'autres acteurs, que si vous avez aimé L'Heure Zéro et ben vous aimerez aussi" (j'ai nommé Le Grand Alibi de Pascal Bonitzer, l'objet du présent post). Le problème avec le premier film (à voir quand même), c'est qu'avec ce genre d'oeuvres, il y a effectivement une chance que ce soit renversant, mais il y a aussi un énorme risque de passer un très mauvais moment. C'est un peu le fugu de la cinématographie (vous savez, ce poisson japonais qui, s'il n'est pas découpé correctement au microne près, provoque une grave intoxication dont vous avez 99,9% de chances de périr). Ne voulant pas périr au cinéma un jour de fête, mais aspirant simplement à un service minimum syndical cinématographique, j'ai donc préféré Le Grand Alibi.

Pourquoi? Et bien, parce que 1) j'adore Agatha Christie; 2) j'avais beaucoup aimé L'Heure Zéro, dernière écranisation en date d'un Agatha Christie; 3) les films dits "choraux" permettent, d'un côté, de revoir les vieux acteurs qu'on aime bien - Pierre Arditi, Miou Miou et Valéria Bruni-Tedeschi dans ce cas; et, d'autre part, de découvrir les nouveaux visages du cinéma français de demain.

L'histoire: un psychologue connu au charisme ravageur (Lambert Wilson - il faut aimer Lambert Wilson pour lui trouver un charisme ravageur, mais bon) est assassiné dans la maison d'un sénateur (Pierre Arditi). Ce n'est pas l'intrigue la mieux ficelée d'Agatha Christie, mais ça se regarde.

La réalisation. Il faut dire que Pascal Bonitzer, au départ, est un réalisateur classé "art et essai" (vous avez peut-être vu "Rien sur Robert" et "Petites coupures"). Il s'essaye ici dans un tout autre genre, mais y apporte ses outils habituels. L'inconvénient, c'est que l'intrigue se dilue en faisant place à un film psychologique, on commence à attacher beaucoup plus d'importance aux personnages et à la manière de les filmer, et à la limite on oublierait presque qu'il y a eu un meurtre. En même temps, si j'avais su que c'était Pascal Bonitzer qui avait adapté "Ne touchez pas la hâche" de Jacques Rivette, je m'en serais méfiée (voir ma critique du Rivette ici, vous comprendrez mieux pourquoi je dis ça). Le film ne devient dynamique que dans sa toute dernière partie (formidable, d'ailleurs), lors d'une course-poursuite sur les toits de Paris, une sorte de "Hitchcock dans le 11e arrondissement".

L'avantage, c'est que, en renonçant à privilégier l'intrigue, Bonitzer permet aux acteurs - même à de tout petits rôles - de se révéler pleinement. J'ai ainsi (re)découvert, pour mon plus grand plaisir, Mathieu Demy (que j'ai vu une seule fois, il y a plus de 10 ans, dans "Jeanne et le garçon formidable") - avec ses faux airs d'Yvan Attal; Céline Sallette, très intéressante et qui commence tout juste son chemin d'actrice après pas mal de petits rôles (voire de rôles de figurante) dans de très bons films, Anne Consigny, parfaite en blonde hitchokienne aux escarpins en daim noir (et dire que je l'avais complètement laissé passer dans "Le Scaphandre et le papillon"), Caterina Murino (c'est elle la superbe brune qui se laisse séduire par Daniel Craig dans Casino Royale et que l'on retrouve assassinée ensuite - toujours aussi belle, mais pas à l'aise en français), et enfin - et surtout - Agathe Bonitzer, la fille du réalisateur, que j'ai trouvé excellente (va savoir pourquoi, elle me rappelle Ludivine Sagnier dans "8 femmes"). C'est probablement celle dont je suivrai la carrière de plus près! Pour les autres, Arditi fait du Arditi, Bruni-Tedeschi fait du Bruni-Tedeschi (rien de nouveau sur ce plan-là, mais je les aime quand même), et Miou Miou innove dans un rôle d'hôtesse inquiète et sagement folichonne.

Faut-il aller voir ce film? Une sorte de compromis râté entre le polar classique et le film d'auteur, Le Grand Alibi n'en reste pas moins un film intéressant dont la réussite doit beaucoup aux acteurs. Vous voilà prévenus de ses défauts (n'y allez pas si vous cherchez de l'action ou une intrigue super tordue), et malgré ça, j'insiste, c'est un film plein de promesses dont certaines sont remplies avec beaucoup de talent.

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