Deux en un de Kira Mouratova | Une Russe à Paris
Une Russe à Paris

mardi 13 novembre 2007

Deux en un de Kira Mouratova

J'ai vu "Deux en un" dimanche soir... Il m'a fallu deux jours pour m'en remettre. Enfin, je vous en parle!
C'était lors du festival "Regards de Russie", festival de films russes donc, dont je parlais récemment. J'avais conclu que "Deux en un" était probablement le seul film à voir... Comme je me trompais!! En fait, il n'y avait pas de films à voir. Mon geste patriotique (soutenons le cinéma russe!) m'a beaucoup coûté! En plus du temps et des cellules nerveuses perdus dans l'aventure, j'ai dû perdre également l'estime et la confiance en mes goûts cinématographiques des amis que j'ai entraînés à la séance... Mais enfin, assez de tergiversations! Parlons donc du film.

"Deux en un" de Kira Mouratova (par ailleurs, réalisatrice du cinéma d'auteur très respectée par les cinéphiles russes) est l'histoire bicéphale d'un théâtre et d'une pièce. La première partie se passe dans un théâtre musical, où l'un des acteurs s'est pendu en costume du Duc de Rigoletto, au beau milieu des décors un brin fantasmagoriques. Un ouvrier de scène le trouve, et s'en suit un tourbillon d'échanges absurdes entre les membres de la troupe. J'étais prête à aimer ce film ne serait ce que pour le seul moment où un des collègues du pendu lui touche la main - "Mais elle est toute froide!" - et entonne "Che gelida manina..." d'une voix de ténor à la retraite. Un clin d'oeil pour les amateurs d'opéra, mais probablement d'un ennui gênant pour les autres... Ou un autre moment atrocement magique: on baisse le décor pour libérer le corps de la corde. Dans un silence enchanté (de mort?), une forêt blanchâtre s'étale doucement sur la scène, tout comme ce corps inanimé qui revient sur terre et termine sa chute dans un bruit sourd de la tête touchant les planches de la scène). Le spectacle est retardé, mais a lieu: là commence la deuxième partie du film. Erreur, on aurait dû en rester là...

La deuxième partie (qui est filmée cette fois-ci comme un film et non comme une pièce de théâtre) raconte l'histoire d'un vieux monsieur riche et de sa fille avec qui il entretient des rapports incestueux des plus incommodants, et qui finit par lui amener une copine, la nuit du réveillon. Le père les enferme dans la maison, "jusqu'à ce qu'il ait joui"... Je vous laisse imaginer.
Si dans la première partie la forme pouvait encore cacher la misère de l'histoire, cela n'est plus possible dans cette deuxième partie qui finit par dégoûter au point de ne plus oser regarder l'écran (pour les uns) ou de rire nerveusement (pour les autres). C'est un peu hystérique.



Je dois avouer que, au milieu des questions rhétorique des spectateurs (dont la plus fréquente était probablement "Mais c'est quoi ce film?"), j'ai croisé des gens (enfin, une vieille dame) qui avaient trouvé que c'était un beau film. Et sur les forums russes, il y a des fans. Mais ce film fait clairement partie de ceux qu'on adore ou qu'on déteste. Pour ma part, dans le genre "ah que le monde est absurde et cruel", je préfère Lynch.

Prix: Nika (Meilleur film des pays de la Baltique et des NIS)
Critiques: Time Out Petersbourg (en russe), Russian Film (en anglais); reportage de la chaîne CTC sur le film (en russe)

2 commentaires:

Fred a dit…

Eh oui, c'était une belle épreuve de self-control, surtout qu'il y avait devant moi une tête chevelue qui non seulement me cachait les trois-quarts des sous-titres, mais en plus semblait bien s'amuser. Bref - disons que j'ai bien aimé l'articulation entre les deux parties (la manière dont on glisse de l'une vers l'autre), mais aussi ton air dépité en sortant de la salle :)

Une Russe à Paris a dit…

:-) j'en ai de la chance que vous ne soyez pas rancuniers!