(Expo) Traces du Sacre au Centre Pompidou - derniers jours | Une Russe à Paris
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dimanche 3 août 2008

(Expo) Traces du Sacre au Centre Pompidou - derniers jours

Premier dimanche du mois et un des derniers jours de l'exposition "Traces du sacré" dont on a entendu tant de bien - comment ne pas en profiter? Ce matin, mue par un élan culturel qui n'a de mesure que le temps hideux qu'il fait à Paris en ce moment, j'ai fait face à une déconfitude complète et totale de mon plan (souvent, les intellos manquent de sens pratique).

Tout d'abord, j'avais oublié la baisse du pouvoir d'achat (si si, ça a un rapport avec l'expo): les gens ne partent plus. L'année dernière, le premier dimanche du mois d'août, il n'y avait que ma mère et moi à Beaubourg. Aujourd'hui, ma mère n'était pas là, mais tous les parisiens, si. Les gens restent à Paris, et non seulement ils restent, ils décident fermement de ne dépenser leurs sous que quand ils ont un couteau sous la gorge (pratique peu courue des muséologues).

Les parisiens sont donc tous venus ce matin à 11h faire la queue devant Beaubourg pour y entrer gratuitement. Il est vrai que 25 minutes de queue (alors qu'il NE PLEUVAIT MÊME PAS - quelle joie) ce n'est absolument rien face au ridicule dont je fus couverte à l'intérieur: mais bien évidemment, l'expo est payante, seul le musée est gratuit! ("Mais vous pouvez aller voir toutes les autres expos aussi", me dit joyeusement le caissier). Mais voyons, je ne suis pas radine - je voulais la voir de toute façon, l'expo. Allons-y donc. Mais c'est la que la déconfitude sus-mentionnée battit son plein.

Comme je l'avais déjà mentionné ici, je ne suis pas férue d'art contemporain. Plus particulièrement, dans l'art contemporain, je ne suis proche que du figuratif (tout ce qui, de loin ou de près, ressemble à un petit bonhomme me réconcilie immédiatement avec la peinture). Comme, sur l'affiche, il y avait une petite patte poilue, je me suis dit "Bingo! C'est du figuratif!" (pauvre fille). En fait, non (et non): le premier "non", car, de la peinture figurative, ne sont présents à l'exposition que des peintres inconnus ("inédits", disent-ils - et on comprend pourquoi), dont les oeuvres ne sont intéressantes que dans la mesure où elles illustrent les commentaires qui les accompagnent. Le deuxième "non", car 70% de l'exposition ne sont pas vraiment figuratifs, ce sont surtout des installations pour comprendre lesquelles il aurait fallu avoir en poche un DEA de Philosophie couplé avec quelques années à l'Ecole du Louvre et quelques stages en galeries d'art contemporain. J'exagère, bien évidemment. Les commentaires (surtout les écritaux qui annoncent les thèmes qui jalonnent l'expo - l'absolu, les dieux enfuis, etc.), c'est ce qu'il y a de plus intéressant. Vous me direz: "T'avais qu'à lire les critiques". Mais tout à fait - simplement, je n'aime pas que l'on me raconte une expo avant que je ne l'aie vue (un non-sens total vu l'orientation de ce blog)...

Je pensais naïvement avoir compris ce qu'allait être l'expo: en unissant les collections du Beaubourg, du Louvre et du Musée du quai Branly, ils allaient faire une recherche de "traces du sacré" (de toutes les religions au déisme) dans la peinture, la sculpture et l'art tribal toutes époques confondues, recherchant des correspondances entre les créateurs et les époques (un peu à la manière du nouvel accrochage du Beaubourg). En réalité, il s'agit davantage d'un parcours historique à partir de la toute fin du 19e siècle (illustrée uniquement par les romantiques allemands) jusqu'à nos jours, où chaque décennie donne naissance à de nouvelles modes et de recherches para-religieuses. Oui, ce sont des traces du sacré qui réunissent ces oeuvres, mais j'ai tout de même un sacré sacré doute quant à la qualité intrinsèque des oeuvres en elles-mêmes. Il y a un Chagall, un ou deux Kandinsky, des Paul Klee, un ou deux Malévitch, mais rien de particulièrement frappant (vous savez, le grand public est avide de "stars", on veut bien faire semblant d'être intello, mais il faut nous donner quelque chose!!!). Il y a une belle installation de Bill Viola. Et ce qui m'a frappée le plus, c'est cette vidéo de Mary Wigman qui danse, je trouve cela absolument fantastique et, pour le coup, totalement révélateur de l'exposition que j'aurais aimé voir:


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Faut-il voir cette expo? Oui, si vous avez la possibilité de venir accompagné(e) d'un étudiant en philo (les meilleurs de ce monde viendront accompagnés de Raphaël Enthoven). Oui, si vous êtes un étudiant en philo (ou Raphaël Enthoven, mais je suis sûre qu'il a autre chose à faire en ce mois d'août que de lire ce blog d'une auditrice de France Culture frustrée par son absence). Oui, si vous aimez l'art contemporain. Non, si seulement le thème des religions vous intéresse: il ne s'agit aucunément des "religions", mais de théorèmes assez sombres quant à la nature du sacré. Non, si vous avez tendance à vous endormir facilement (ce n'est presque pas éclairé, un peu façon "quai Branly"). Et non, si vous avez mal à la tête (cela ne fera que l'aggraver).

Que faire après? Allez prendre un peu d'air frais, installez-vous en terrasse (couverte) place Tinguely. Respirez. Si cela ne suffit pas pour vous remettre en selle, allez jusqu'à la place des Vosges. Etalez-vous sur l'herbe. Inspirez.
Paris. Un ciel haut. Du vent sur vos joues. Un air baroque venant d'une des galleries. Votre mal de tête s'évapore.
C'est divin. Pas besoin de théories.